5e dimanche de Pâques : le commandement de l’amour

Rien de plus simple que de « liker » 👍 , rien de plus difficile que d’aimer ❤️ .
Ce verbe « aimer » a été mis à toutes les sauces, tellement galvaudé qu’il a perdu sa puissance évocatrice et sa radicalité. Il est vrai que la langue française est ici relativement pauvre, elle qui se contente du même verbe pour dire l’attachement à son chien, le goût pour le chocolat ou la passion pour son amant.
Et je dois bien vous avouer que, quand j’entends seriner comme un refrain mielleux que « Dieu est amour », il m’arrive d’être las de cette antienne tellement consensuelle qu’elle en perd sa force et son sens, qu’elle fait et de Dieu et de l’amour des concepts lisses, fades, lassants de banalité.
L’amour, le vrai, c’est autre chose ! C’est rude, violent, passionnel. L’amour nous fait rougir, sourire, pleurer, espérer… Parfois il fait souffrir. Régulièrement, il entraîne dans des folies. Il comble le cœur quand il est partagé ou l’assèche quand il est meurtri. Il blesse et il cicatrise. Jamais il ne laisse indemne !
L’amour, le vrai, n’est pas qu’un sentiment, un engouement amoureux, un attachement familial ou amical… Il est un engagement de tout notre être, qui doit nécessairement dépasser nos ressentis pour s’accomplir.
L’amour, le vrai, est invitation à aimer aussi ceux qui n’inspirent aucun sentiment de sympathie ni de compassion, à aimer ceux qui sont laids, répugnants ou tombés en déchéance, à aimer ses ennemis ou ceux qu’on présente comme des monstres inhumains…
Mais comment aimer ceux qui ne sont pas aimables ? Une mère pourra-t-elle jamais pardonner à celui qui abuse de son enfant ? Un Ukrainien pourra-t-il jamais excuser le soudard qui a tué son frère, son fils ou son père ? C’est rude, violent… Est-ce même légitime de le demander ???
C’est pourtant ce que signifie aimer à la manière de Jésus, lui qui n’hésita pas à prier pour ses bourreaux : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23,34).
Il ne s’agit pas de trouver l’autre sympathique, ou de lui trouver des excuses… Mais de découvrir en lui la parcelle d’humanité qu’il porte, parcelle parfois profondément enfouie. De ne jamais lui dénier cette dignité, et de nous mettre au service de cette humanité que porte chacun, de croire que nous pouvons la faire grandir.
Parfois, nous nous en sentons incapables – et jamais personne n’a le droit de nous en faire le reproche. Alors, Dieu seul, qui habite au plus intime de notre cœur, peut prendre le relais, et nous apprendre patiemment à aimer. (Evangile de Jean 13,31-35)

Abbé Olivier Fröhlich, vicaire général de Tournai

(article paru sur son profil FB ce 15 mai 2022)

Méditation sur l’évangile de ce dimanche (4ème dimanche de Pâques C)

La première étape de l’émission « The Voice » se base exclusivement sur les voix des candidats. Les coaches leur tournent le dos et se retournent seulement s’ils sont charmés par une voix. Alors l’aventure commence vraiment.
Dans notre vie, il y a des voix chaleureuses qui séduisent, des voix puissantes qui encouragent, des voix mélodieuses qui nous poussent à la rêverie. Mais aussi d’autres voix qui nous crispent ou nous rebutent…
Et puis il y a la douce voix des mamans qui réconfortent et rassurent – comment ne pas l’évoquer en ce jour de fête des mères ! – et la voix de l’être aimé, reconnaissable entre mille.
Et il y a des voix qui nous donnent l’envie d’aller plus loin, de découvrir la personne, le moment où les coaches de « The Voice » se retournent.
Les disciples se sont laissé séduire par une voix, celle de Jésus, une voix qui les touche au cœur, une parole qui les mobilise, une personnalité qu’ils ont envie de découvrir. « Mes brebis écoutent ma voix ; moi, je les connais, et elles me suivent », dit Jésus. Cette relation qui s’est créée entre eux a suscité la volonté de mieux se connaître, et éveillé l’envie de passer du temps avec lui, d’avancer en sa compagnie sur les chemins de vie qu’il leur traçait.

Abbé Olivier Fröhlich, vicaire général du diocèse de Tournai

« Mater dolorosa »

Au soir du vendredi, reste gravé le visage d’une « mater dolorosa ». Marie vient de perdre son enfant. Y a-t-il plus grande souffrance pour une mère que celle-là ?
Elles sont nombreuses aujourd’hui, ces mères qui souffrent, qui pleurent, qui ont le cœur brisé…
• Mères de Kiev et de Moscou qui, des deux côtés de la frontière, n’ont plus à serrer que le corps sans vie d’un fils ou d’un mari.
• Mères au cœur transpercé qui voient leurs filles violées, leurs fils ruinés par la drogue, leur enfant emporté par un cancer ou un accident de la route.
• Mères d’angoisse qui, sans qu’on ait besoin de leur expliquer quoi que ce soit, vibrent aux détresses de leurs filles et de leurs fils.
Tant de « pietà » qui prennent dans leurs bras leur enfant meurtri ou brisé. Silence et ténèbres, comme au samedi saint.
Et il y a aussi un père de douleur, un Père du ciel qui souffre la mort de son fils avec qui il ne fait qu’un, et qui pleure toutes les morts de ses enfants…
Crépuscule d’un monde… Bientôt, ce sera l’aurore.

 

Abbé Olivier Fröhlich, vicaire général du diocèse de Tournai (publié dans son fil d’actualité FB le 16 avril 2022)

« Jésus, crucifié au Golgotha comme à Marioupol »

Hier, à la Cène, Jésus contemplait l’humanité d’en bas, en lui lavant les pieds. Aujourd’hui, c’est d’en haut que Jésus regarde l’humanité. Du haut de la croix. D’un regard marqué par la vulnérabilité et la fragilité. Et nous levons les yeux pour découvrir l’amour qui se donne tout entier.
La Passion du Christ nous renvoie à toutes les tragédies humaines. Et, cette année, le Christ parcourt son chemin de croix dans les villes et villages martyrisés d’Ukraine. Il meurt sous les bombes à Kharkiv et dans la gare de Kramatorsk, il est enterré dans les charniers de Boutcha.
Et les bourreaux de l’Ukraine n’ont rien à envier à ceux qui ont condamné Jésus à la mort atroce d’un lent étouffement sur la croix, souffrance exposée au voyeurisme des passants. Nous redécouvrons que la barbarie qui anéantit la dignité humaine au Golgotha surgit à nouveau sur la terre d’Europe, et que l’uniforme, depuis le légionnaire jusqu’au troupier russe, permet souvent aux instincts les plus vils de reprendre possession de l’homme.
« Voici que les ténèbres couvrent la terre, et la nuée obscure couvre les peuples » (Isaïe 60,2). Le cri du Christ crucifié au Golgotha et à Marioupol déchire les ténèbres qui envahissent le monde, cri de détresse et d’espérance.
♱ Vendredi Saint: la Passion dans l’évangile de Jean (Jn 18,1-19,42)
Abbé Olivier Fröhlich, vicaire général du diocèse de Tournai (paru sur son profil FB le vendredi 15 avril 2022)

Lundi Saint : Evangile de Jean 12,1-11

Jésus arrive à Béthanie, chez Lazare et ses sœurs, Marie et Marthe. Hum… deux femmes qui ne sont pas mariées, cela dut faire grincer quelques dents !
Marie de Béthanie, celle qui vient s’asseoir auprès de Jésus, avec probablement cette disponibilité naturelle et cette qualité d’écoute qui semblent si spontanées aux femmes. Marie la sensible, qui verse sur les pieds de Jésus un parfum de prix – cela aussi fera grincer des dents ! – comme si déjà elle avait tout compris. Une autre Marie, la mère de Jésus, frémit du plus profond de ses entrailles maternelles en ces jours de Passion. Et une autre Marie encore, elle qu’on surnomme la Magdaléenne, vibrera au matin de pâques quand elle croise celui qu’elle pense être le jardinier. Et puis il y a les filles de Jérusalem bouleversées quand passe Jésus accablé par la croix. Et encore la mère de Jacques, et Salomé, et Jeanne, qui accompagnent la Magdaléenne au tombeau.
Foisonnement de femmes dans les dernières pages des évangiles ! Parce qu’il fallait aussi ces regards féminins pour nous faire découvrir le visage de Jésus qui se donne par amour. Et parce que le cœur des mères est incontournable pour comprendre qui est le Fils de l’Homme.
Publié par l’abbé Olivier Fröhlich, vicaire général du diocèse de Tournai, sur son mur Facebook.