Homélie du « Jeudi Saint » par le diacre Xavier de VOGHEL

Frères et sœurs,

II y a dans le déroulement de l’année liturgique des temps très forts, des occasions uniques de penser, de méditer et de rendre grâce au Seigneur pour des actions précises, des événements marquants ou des ministères particuliers. Et le Jeudi Saint est certainement un de ces grands temps forts du temps de Pâques.

Aujourd’hui, en effet, nous revivons le dernier repas que Jésus prit avec ses apôtres et au cours duquel, comme nous le rappelait Saint Paul, il nous fit le don de l’Eucharistie. Mais, par le choix du passage de l’évangile de St Jean, au cours duquel Jésus se mit aux pieds de ses disciples pour les leur laver, c’est aussi le don de l’amour par le service que Jésus nous donne.

Ces deux gestes du Seigneur tracent les points forts de la vie de son Église : aimer par le don de soi et le service des autres.

Bien évidemment tous les chrétiens, disciples de Jésus Christ sont appelés à agir comme leur Seigneur. Et Jésus n’a pas cessé de rappeler cela : les Béatitudes qu’Il nous a données en sont la plus vivante expression.

Et pourtant, au soir de la Dernière Cène, le don de l’Eucharistie et le lavement des pieds, II les a partagés avec le petit groupe de ses douze apôtres réunis autour de Lui.

Depuis ce soir-là, et depuis plus de 2000 ans, l’Église a discerné dans ce double geste du Seigneur, le double ministère qui fait toute sa richesse : le don de l’Eucharistie confié aux apôtres est le signe par excellence du ministère des prêtres ; le service évoqué par le lavement des pieds est le signe du ministère du diacre.

Entre ces deux ministères, il n’y a aucune concurrence, aucune supériorité, aucune séparation : ils sont complémentaires et s’appuient l’un sur l’autre. Ils s’enrichissent mutuellement.

Oui, Frères et sœurs, les prêtres et les diacres sont appelés à être l’icône du Christ, à être des signes vivants de son amour partagé dans la simplicité du cœur.

Le prêtre se voit confier par le Seigneur le ministère de berger de son Peuple, tel que Lui-même l’a été. Et ce berger soucieux de guider la Communauté chrétienne à la suite de Jésus, a reçu du Christ Lui-même la mission de nourrir son Peuple, son Église, par le sacrement de l’Eucharistie, de le relever par celui de la Réconciliation.

Le diacre quant à lui, se voit confier par le Seigneur le ministère de serviteur de son Peuple, tel que Lui-même l’a été. Et ce serviteur attentif à tous les besoins de la Communauté chrétienne a reçu du Christ Lui-même la mission de servir son Peuple, son Église, par une présence toute particulière auprès des plus petits et des plus pauvres.

Et Dieu sait… combien dans notre monde et au sein même de notre Église, se cachent de multiples pauvretés !

Il est impossible de dissocier ces 2 ministères. Quand le Christ partage le Pain de Vie et dit : « Faites ceci en mémoire de moi », puis quand il s’agenouille devant ses disciples et dit : « Vous aussi, faites de même », il réunit prêtres et diacres dans un même désir d’aimer et de servir dans une totale humilité tout en leur confiant aux uns et aux autres un ministère propre.

 

Mais qu’il s’agisse du sacerdoce ou du diaconat, toujours est et reste premier cet amour sans mesure donné en réponse à l’amour du Christ.

On n’est pas prêtre ou diacre « pour faire quelque chose » ou parce qu’on peut accomplir tel

geste ou telle tâche. On est prêtre ou diacre pour « être » comme le Seigneur et agir selon son Cœur auprès de nos frères.

Il n’est pas question ici de métier ou de fonction. Il est question de ministère à accomplir comme le Christ, au nom du Christ et pour le Christ.

Et qu’y a-t-il de plus grand que de se voir confier par le Seigneur Lui-même cette mission de le rendre présent aux Hommes dans l’Eucharistie et de le rendre proche des Hommes à travers le service ?

Ce sont là les deux expressions concrètes et vivantes de la dernière parole du Seigneur avant son Ascension : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps ».

Chaque fois que nous voyons des hommes ou des femmes qui se mettent totalement au service des autres, nous touchons du doigt, concrètement, cette présence du Christ parmi nous.

A travers Mère Teresa qui rend leur dignité aux mourants des rues de Calcutta, comment ne pas voir Jésus qui se penche vers le paralytique ou le lépreux ? A travers ces jeunes qui consacrent leur temps de vacances à rejoindre une ONG qui vient en aide aux camps de réfugiés ou aux populations affamées, comment ne pas voir Jésus qui, trois ans durant, n’a ménagé ni sa peine ni son temps pour accueillir, relever, encourager ceux qui venaient à Lui ? A travers ceux-là et tant d’autres, nous comprenons que le Christ est vraiment avec nous. Se servant de notre cœur et de nos bras pour nous mettre au service les uns des autres. Nous n’avons aucun mal à réaliser cela et cela crée d’ailleurs en nous l’émerveillement.

Mais il y a aussi cette autre manière que le Christ a de se rendre présent parmi nous, à travers, l’Eucharistie, le Pain Vivant, son Corps donné pour que nous ayons la vie. Il est certainement plus difficile d’entrer dans cette présence du Christ parce que nous ne voyons rien, nous ne sentons rien. Nous ne pouvons qu’entrer dans une démarche de foi totale dans la Parole de Jésus dite le soir du Jeudi Saint : « Ceci est mon Corps, donné pour vous ».

Quand le Seigneur a évoqué ce don de Lui-même dans l’Eucharistie, les réactions n’ont pas tardé à se manifester. Rappelons-nous l’Évangile : Jésus disait : « Je suis le Pain Vivant : qui mange de ce pain vivra pour toujours. Il demeure en moi et Moi je demeure en lui ». Mais à ces mots, beaucoup murmuraient contre Jésus et même beaucoup de ses disciples disaient : « Ce qu’Il dit est inacceptable, qui donc peut encore L’écouter ? ».

Frères et sœurs, n’entendons-nous pas souvent autour de nous, y compris dans nos communautés chrétiennes, les mêmes réflexions ? Or, le Seigneur est clair. Il dit : « CECI EST MON CORPS, CECI EST MON SANG ». Ce Pain de l’Eucharistie n’est pas une image ou un signe. Il est réellement présence du Christ.

Quand l’Église propose des temps d’adoration du Saint Sacrement, il ne s’agit nullement d’adorer un symbole, ce serait de l’idolâtrie, mais bien Dieu Lui-même présent dans le Pain consacré. Entrer dans ce mystère de la Présence sacramentelle du seigneur, nous ne pouvons le faire qu’avec un cœur ouvert et aimant, et une totale confiance dans ce qu’a dit Jésus.

Ne faisons pas le tri dans les Paroles de Jésus ! Ne croyons pas uniquement ce qui nous arrange bien !

Après son discours sur le Pain de Vie, le Seigneur en voyant beaucoup Lui tourner le dos a dit à ses apôtres : « Est-ce que vous aussi vous voulez partir ? » Puissions-nous ne jamais être de ceux qui abandonnent le Seigneur parce que sa Parole nous déconcerte ou nous interpelle trop à notre goût !

Au contraire, quand l’Évangile nous remet en question, n’ayons pas peur de demander au Seigneur de mieux comprendre ce qu’Il veut nous dire. Demandons-Lui d’ouvrir l’intelligence de notre cœur, comme Il l’a fait pour les disciples d’Emmaüs : « Ils Le reconnurent à la fraction du pain ». L’Eucharistie est vraiment ce Trésor de notre foi, un trésor que Jésus a confié à son Église et qui nous est donné à chaque fois que le Prêtre prononce les paroles de la consécration.

Oui, frères et sœurs, notre Dieu a voulu avoir besoin des Hommes… pour Se donner aux Hommes…

Il a pris le risque ! C’est le risque de l’Amour ! Devant cette confiance de Dieu, nous ne pouvons que nous sentir tout petits et très pauvres… car nous savons bien qu’avec nos propres forces nous ne pouvons rien. Nous savons bien que nous avons à tout recevoir de Lui et que sans Lui nous ne sommes rien.

Alors, ce soir, frères et sœurs, je vous demande de prier pour les prêtres et les diacres. Qu’ils sachent, partout et toujours, rester tout petits devant Dieu et devant leurs frères mais infiniment présents par l’amour qu’ils mettent dans leur vie.

Je vous demande de prier pour nous : pour que nous ne devenions jamais propriétaires de ce que le Seigneur a confié dans nos mains : son Eucharistie et le service de son Église.

Pour que nous Lui laissions toujours toute la place en faisant nôtre ce cri du cœur de Jean-Baptiste : « Je ne suis pas digne de dénouer ses sandales ! Il faut que je diminue pour que Lui grandisse. »

Durant quelques moments encore, dans le silence, rendons grâce au Seigneur pour sa Présence dans l’Eucharistie. Rendons-Lui grâce pour l’exemple du service et du don de soi qu’Il nous a laissé. Jésus se donne totalement par amour dans l’Eucharistie, Il se donne totalement par amour dans le service des plus petits. Ces deux gestes du Seigneur sont étroitement liés et nous rappellent qu’à notre tour nous ne pourrons aimer Dieu qu’en aimant nos frères et que nous ne pouvons aimer nos frères qu’en nous enracinant en Dieu. AMEN.

X. de VOGHEL, Diacre

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