Homélie – 34ème dimanche C – Fête du Christ, Roi de l’univers – Abbé Fernand Stréber

Un roi bafoué, un roi aimé
Évangile  (Lc 23, 35-43)

En ce temps-là,  on venait de crucifier Jésus,  et le peuple restait là à observer.  Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient :  « Il en a sauvé d’autres :  qu’il se sauve lui-même,  s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! »      Les soldats aussi se moquaient de lui ;  s’approchant, ils lui présentaient de la boisson vinaigrée,      en disant :  « Si tu es le roi des Juifs,  sauve-toi toi-même ! »

Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui :  « Celui-ci est le roi des Juifs. »      L’un des malfaiteurs suspendus en croix  l’injuriait :  « N’es-tu pas le Christ ?  Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! »      Mais l’autre lui fit de vifs reproches :  « Tu ne crains donc pas Dieu !  Tu es pourtant un condamné, toi aussi !      Et puis, pour nous, c’est juste :  après ce que nous avons fait,  nous avons ce que nous méritons.  Mais lui, il n’a rien fait de mal. »      Et il disait :  « Jésus, souviens-toi de moi  quand tu viendras dans ton Royaume. »      Jésus lui déclara :  « Amen, je te le dis :  aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »

Homélie

Nous fêtons aujourd’hui le Christ Roi de l’univers et pourtant, à première vue, Jésus n’a rien d’un roi.  Ecoutons quelques éléments de son parcours sur terre:

une étable pour naître,

Sa cour, n’en parlons pas: des bergers, des pêcheurs, des lépreux, des pécheurs.

Son manteau royal est rouge, couleur de son sang.

Son bâton de commandement, c’est un roseau.

Sa couronne est d’épines.

Et enfin son trône, c’est une croix.

Malheureusement, Jésus n’est pas seul à subir cet outrage.

Ca fait mal de voir l’Innocence même condamnée à ce type de supplice.  Je pense aussi aux bavures policières à notre époque.

Ca fait mal de voir Jésus fouetté par un soldat dès qu’il trébuche sur le chemin du calvaire: je pense aussi aujourd’hui aux réfugiés africains qui traversent la Méditerranée et sont frappés quand ils se révoltent lors du rapatriement. je pense aujourd’hui aussi aux personnes torturées pendant leur interrogatoire.

Ca fait mal d’entendre le bruit des clous s’enfonçant dans les poignets de Jésus.  Je pense aujourd’hui à toutes les victimes qui connaissent une mort affreuse suite à des actes violents.

Regardons de plus près l’extrait de l’évangile qui vient d’être proclamé.  5 acteurs face à Jésus sur la croix:

– Le peuple regarde.  Ce geste passif vient de cette foule qui, quelques mois auparavant, courait activement à la suite de Jésus pour l’écouter.

– Les chefs ricanent : « Il en a sauvé d’autres.  Qu’il se sauve lui-même« .  Tous les gestes dont Jésus a pris l’initiative depuis trois ans sont ridiculisés..

– Les soldats, moqueurs aimeraient assister à une manifestation de puissance, à l’image des tentations au désert où Satan demande à Jésus de transformer des pierres en pain. «  Si tu es le roi des juifs, sauve-toi toi-même. » disent-ils

– Un malfaiteur attend un miracle spectaculaire en disant. « Sauve-toi toi-même et nous avec. »

– L’autre détenu est le seul à comprendre ce qui se passe.  Il sera le dernier compagnon de Jésus sur cette terre et son premier invité dans le Royaume.  « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le paradis.» dit Jésus.  C’est surprenant d’apprendre que le premier à entrer au paradis est un prisonnier de droit commun, conscient de sa faiblesse.

Alors, – me direz-vous – pourquoi donc l’Eglise a-t-elle choisi cet extrait d’Evangile racontant la mort infâme du Christ pour nous parler de sa royauté?  Reconnaissons que c’est une singulière façon de nous présenter le roi de l’univers, en nous le montrant sous les traits d’un condamné tourné en dérision.

Mais justement, c’est au Golgotha que Jésus nous révèle le sens ultime de sa royauté.  Il nous dévoile ce sens non pas dans un acte de souffrance, dans un acte de mort mais dans un acte suprême d’amour.  Il subit la souffrance et la mort comme malheureuse conséquence de cet amour.  Jamais, dans toute sa vie, Jésus n’a révélé une telle pureté d’amour, une telle force de caractère, sinon à cette minute même où, défiguré et rejeté, il offre sa vie parce qu’il veut rester fidèle à son choix.

Le Christ a vécu sa mort à la manière d’un surhomme, je dirais mieux :à la manière de Dieu.  Sa divinité éclate davantage dans les ténèbres du Golgotha que dans la lumière de sa transfiguration auprès de Moïse et d’Elie.

Prenons le temps de regarder 3 attitudes de ce roi de l’Amour au moment de sa mort:

Pas une plainte ne sort de ses lèvres.  Il instaure un Royaume dans lequel il ne se centre pas sur lui-même.

Pas un instant de révolte.  Il instaure un Royaume où le cercle infernal de la violence est cassé.

Pas un reproche.  Il établit un Royaume où la haine est métamorphosée par le pardon. Il séduit sans s’imposer.  Il étonne mais respectueusement.  Voilà pourquoi Jésus a eu un tel rayonnement depuis 20 siècles.

Nous aussi, comme le détenu au Golgotha, nous voudrions dire à ce Dieu séduisant: « Seigneur, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton règne.»    Nous aussi, nous aimerions que Jésus nous réponde en disant « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis.»  Quelle bonne nouvelle !

Dernier dimanche de l’année liturgique, fête du Christ roi de l’univers.  Pas tellement un triomphe, me direz-vous.  Mais si… le triomphe de l’amour.

Pour ce cadeau d’un amour qui est allé jusqu’au bout, Seigneur, nous te disons merci.

Abbé Stréber Fernand

Prière universelle

Nous sommes aujourd’hui au dernier dimanche de l’année liturgique.

  • Seigneur, nous te remercions pour tout ce que nous avons vécu de bon et de beau depuis un an, et nous te remercions aussi d’être toujours avec nous pour faire face aux difficultés et pour relever tous les défis qui se présentent à nous.
  • La Convention internationale des droits de l’enfant a été célébrée la semaine dernière. Que cette initiative des Nations Unies, trouve chez nous un écho de solidarité pour tous les enfants qui souffrent. Seigneur, nous te prions.
  • Ce week-end, les petits déjeuners du monde sont organisés par Oxfam. Seigneur, ouvre notre cœur et notre intelligence pour rester sensible au commerce respectueux des paysans de chez nous et du Tiers-Monde. Nous te prions.
  • La semaine de la Sainte Catherine oriente notre regard vers des arbres à sauvegarder ou à planter. Seigneur, aide-nous à prendre de nouvelles initiatives pour améliorer l’environnement  qui nous est offert. Nous te prions.
P’tit rawett’ – HISTOIRE D’UNE GRAINE MINUSCULE

C’était au Vietnam.  Un jour d’été, quelques collégiens se proposèrent de faire une excursion en montagne.  Ils choisirent un rocher de moins de 1000 m d’altitude, mais très escarpé.  Après pas mal de peine, surtout à cause de la chaleur tropicale, ils arrivèrent enfin au sommet où ils découvrirent un petit plateau rocailleux recouvert d’herbes roussies par le soleil.  Au milieu de ce plateau gisait un gros rocher rectangulaire présentant une surface presque plane hormis une petite fente.  Cette pierre a servi de quartier général au groupe.

L’été suivant, Lucien, une personne du groupe, eut l’envie d’aller se recueillir seul sur cette montagne.  Arrivé au sommet, il retrouve sans peine la pierre en question.  Il voulait s’asseoir dessus, mais elle était déjà brûlante malgré l’heure matinale.  Il remarqua alors une petite plante qui poussait d’une fente au milieu de la pierre.  C’était une espèce tropicale appelée banian dont les graines sont minuscules, mais dont les sujets adultes aux branches étayées de nombreuses racines aériennes sont autrement impressionnants que les chênes et les hêtres.  Une graine de cette espèce était tombée, Dieu sait comment, dans la fente et, y ayant trouvé un peu de mousse, a germé et poussé.  Lucien aurait pu arracher cette petite plante du bout des doigts, mais à quoi bon ! En redescendant, il l’avait complètement oubliée.

Dix ans plus tard, toujours en été, il voulut grimper encore une fois sur cette montagne et revoir l’endroit où il avait vécu des moments inoubliables.  Quel ne fut pas son étonnement lorsque, encore loin, il voyait se dresser, à la place même où devait se trouver la pierre, un arbre puissant aux troncs multiples.  Sa surprise fut totale quand, arrivé sur place, il constata que la pierre était brisée en deux, et visiblement soulevée par les racines de l’arbre..

Ainsi donc, comme une dynamite, mais sans bruit ni éclat, une graine minuscule a fait sauter un rocher.

Extrait de : « Il était une foi », éditions CRJC, Liège1996

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