Homélie – 22ème dimanche Temps ordinaire Année C – Abbé Fernand Stréber

L’humilité est un chemin permettant d’aimer l’autre pour lui-même
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc  14,1.7-14

Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient. Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit : « Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi. Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : ‘Cède-lui ta place’ ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : ‘Mon ami, avance plus haut’, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi. En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. » Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour. Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

Homélie

Lorsque je prépare une homélie, un de mes premiers réflexes est de me poser la question : « En quoi ce texte d’Evangile est-il une Bonne Nouvelle pour moi  aujourd’hui? » Cette question est comme une clé pour ouvrir le texte.  (montrer une clé )

Mais parfois, la clé grince un peu.  C’est le cas aujourd’hui.  Dans un premier temps Il m’a été difficile de découvrir une Bonne Nouvelle dans ce passage d’évangile et ensuite de vous la partager.  Mais pourtant il y a une bonne nouvelle à dénicher dans ce texte.  J’y reviendrai à la fin de mon homélie.

L’Evangile est le livre qui dévoile le vrai visage de Dieu.  Cà c’est une Bonne nouvelle.  Mais quel est donc le visage de Dieu que je peux trouver dans cette parabole que nous venons d’entendre ?

Nous y voyons que Jésus, prend son repas chez un chef pharisien, responsable des autres.  Comment plusieurs pharisiens chef présentent-ils Dieu dans les synagogues et sur les places publiques ?  Il est un Dieu d’une pureté et d’une rigidité exemplaires, un Dieu de gloire et de majesté.  Dieu est quelqu’un à qui on doit plaire en respectant scrupuleusement la Loi dictée à Moïse.  En dehors de lui, rien n’existe. Devant lui, nous ne sommes pas grand-chose.

Je me demande en quoi un tel Dieu me concerne.  Il est insaisissable, il est impossible de le connaître et donc de l’aimer.  Je ne peux que me soumettre à sa Loi en tremblant devant Lui et en me culpabilisant.  En effet, comment éprouver de l’amour pour un être si distant, si lointain, si mystérieux.

Ce Dieu, comme les dieux de plusieurs mythologies (notamment les mythologies grecques et romaines ayant cours dans le pays de Jésus), a servi très longtemps le pouvoir politique des pharisiens en maintenant les petits dans la peur et la soumission.

Ces images de Dieu sont une injure au Dieu de l’Evangile.  Jésus « pite » dans la fourmilière.  Il ouvre une voie accessible à tous y  compris pour ceux qui sont à la marge tels ceux qui sont cités dans la seconde partie de l’évangile.  Jésus choisit le cadre d’un repas pour le faire.  Jésus utilise souvent le cadre d’un repas pour nous dévoiler des choses essentielles. ( Ex. : la 1° place à table, Cana, Béthanie, dernière cène,….)

La grande nouveauté de Jésus, – que les pharisiens n’admettront jamais –  et qui lui a coûté la vie, c’est de rapprocher Dieu de l’Homme et d’introduire l’Homme dans la famille de Dieu.  Ce Dieu, Jésus l’appelle : « Abba », « papa » et il l’identifie à l’Amour.  L’amour de Dieu pour nous est inouï, miséricordieux et gratuit.  J’en prendrai d’autant plus conscience si je fais preuve d’humilité devant Lui.  En effet, adopter l’attitude d’humilité me permet de développer une plus grande profondeur  dans mes relations avec les autres et aussi avec Dieu.  J’irais jusqu’à dire que seule la personne humble peut vraiment aimer l’autre pour lui-même.

Naturellement cela change tout.  Dieu n’est plus un extraterrestre, un  martien mais il devient un familier, un partenaireOn peut  même Lui dire « Tu ».  C’est ce que nous faisons par exemple en récitant le Notre Père.

Suite au message de Jésus, ce n’est plus l’Homme qui s’anéantit devant Dieu mais c’est Dieu qui s’abaisse devant l’Homme.  C’est Dieu qui se met sur le côté pour mettre l’Homme au centre. Il adopte l’attitude d’humilité.

Alors que Jésus aurait eu le droit de « revendiquer le rang qui l’égalait à Dieu »comme le dit saint Paul aux Philippiens,  ( Ph 2,6-8) Jésus a choisi de se mettre à la dernière place comme dans la parabole de ce jour.  .  Dans la scène du lavement des pieds, le jour avant sa crucifixion, (Jn 13,1-11) nous voyons Jésus en tablier, Jésus à genoux aux pieds des hommes, Dieu lavant les pieds sales de l’humanité..  « Je suis au milieu de vous, à la place de celui qui sert.  (Lc 22, 27)  Cela résonne en moi comme bonne nouvelle.  Et je suis heureux de vous le partager.  Montrer la seconde clé

Je comprends que ce bouleversement radical de l’image que beaucoup de croyants se font de Dieu les indispose.  Ils s’indignent de voir Dieu perdre la place d’honneur.

Mais ne serait-ce pas à nous maintenant de lui rendre la politesse en lui disant comme dans la parabole de ce jour : Viens, Seigneur, prends la première place à table.  Nous en serons heureux parce que notre foi est le reflet de l’amour du Christ.

Abbé Fernand Stréber

P’tit rawett’ : DIEU A-T-IL DES POUX ?

Un rabbi fut un jour sidéré en entendant quelqu’un prier. Non seulement ce que disait l’homme était absurde.  Par surcroît, il insultait Dieu !

            « – Laisse-moi m’approcher de toi, mon Dieu, implorait l’homme.  Je promets de laver ton corps quand il sera sale.  Si tu as des poux, je t’en débarrasserai.  je te confectionnerai de belles chaussures. Personne ne prend soin de toi, mon Dieu.  Quand tu seras malade, je t’apporterai un remède. « 

            Le rabbi n’y tint plus :- « Tais-toi ! cria-t-il. Arrête de débiter des sornettes. Te rends-tu compte de ce que tu dis ?  Dieu a-t-il des poux ?  A-t-il besoin de toi pour se soigner ? Qui t’a appris cette prière blasphématoire ? »

            – « Personne, répondit l’homme. Je suis pauvre et ignorant, on ne m’a rien enseigné. Je ne parle que de ce que je connais. Les poux m’accablent, alors je me dis qu’ils doivent aussi déranger Dieu.  Ce que je mange me donne des aigreurs. Dieu en souffre peut-être aussi. J’ai pris mes propres expériences pour en faire une prière.  Mais si tu peux m’apprendre quelque chose de mieux, je t’en serai reconnaissant. »

            Le rabbi lui enseigna une belle prière. L’homme s’inclina devant lui et le remercia. Le maître était très satisfait, convaincu d’avoir accompli une bonne action. Il leva les yeux au ciel pour voir si Dieu était content de lui.  Or Dieu était furieux !

            « – Je t’ai donné pour mission d’amener les gens vers moi, tonna-t-il, et voici que tu éloignes un de mes meilleurs dévots.  Ce que tu lui as appris n’est pas une prière. La prière n’a rien à voir avec la Loi.  Elle est amour.  L’amour est sa propre loi, il ne lui en faut aucune autre.

Midrash juif

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