Homélie – 2ème dimanche de l’Avent – Année C – Abbé Fernand Stréber

« Tout être vivant verra le salut de Dieu »
Première lecture –  livre du prophète Baruc Ba 5, 1-9

Jérusalem, quitte ta robe de tristesse et de misère, et revêts la parure de la gloire de Dieu pour toujours, enveloppe-toi dans le manteau de la justice de Dieu, mets sur ta tête le diadème de la gloire de l’Éternel. Dieu va déployer ta splendeur partout sous le ciel, car Dieu, pour toujours, te donnera ces noms : « Paix-de-la-justice » et « Gloire-de-la-piété-envers-Dieu ». Debout, Jérusalem ! tiens-toi sur la hauteur, et regarde vers l’orient : vois tes enfants rassemblés du couchant au levant par la parole du Dieu Saint ; ils se réjouissent parce que Dieu se souvient. Tu les avais vus partir à pied, emmenés par les ennemis, et Dieu te les ramène, portés en triomphe, comme sur un trône royal. Car Dieu a décidé que les hautes montagnes et les collines éternelles seraient abaissées, et que les vallées seraient comblées : ainsi la terre sera aplanie, afin qu’Israël chemine en sécurité dans la gloire de Dieu. Sur l’ordre de Dieu, les forêts et les arbres odoriférants donneront à Israël leur ombrage ; car Dieu conduira Israël dans la joie, à la lumière de sa gloire, avec sa miséricorde et sa justice.

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 3, 1-6)

L’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode étant alors au pouvoir en Galilée son frère Philippe dans le pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias en Abilène, les grands prêtres étant Hanne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, le fils de Zacharie. Il parcourut toute la région du Jourdain, en proclamant un baptême de conversion
pour le pardon des péchés, comme il est écrit dans le livre des oracles d’Isaïe, le prophète : Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers     Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; et tout être vivant verra le salut de Dieu.

Homélie

Plusieurs personnages sont cités dans l’évangile pour dater le début de la prédication de Jean-Baptiste.  Si Luc écrivait aujourd’hui, çà donnerait ceci : Antonio Guterres étant Secrétaire Général de l’ONU, l’an 1 de la Présidence du Conseil Européen par António Costa, l’an 12 du règne de Philippe, Nicolas Grégoire étant Bourgmestre de Marche, Pierre Warin, étant Evêque du diocèse de Namur-Luxembourg, la parole de Dieu fut adressée à des chrétiens réunis à Marloie.  Les 2 premiers versets de l’évangile soulignent que Dieu s’est enraciné dans l’histoire humaine à un moment et un lieu précis.  Ce texte accentue le fait que Dieu n’a pas triché avec l’humanité quand il s’est incarné.  Jésus n’est ni une météorite ni une étoile.

Pour dater le début de la prédication de Jean-Baptiste, Luc a ameuté tous les maîtres du monde.  Pilate est gouverneur de la Judée.  C’est aussi lui qui signera l’arrêt de mort de Jésus.  Hérode règne en Galilée.  C’est lui qui a fait massacrer tous les petits enfants quand il a appris la naissance de Jésus.  Avec eux, le peuple juif subit l’humiliation politique.

Hanne et Caïphe sont grands prêtres, patrons du temple de Jérusalem, centre de la vie religieuse juive.  A cause d’eux, des souffrances atteignent les petites gens dans leur dignité.  Avec eux, le peuple juif subit l’humiliation religieuse.

Et puis il y a Jean-Baptiste.  Le contraste est manifeste entre lui et les personnages qui précèdent.  Il ne fait pas le poids lui qui n’est pas à l’aise avec tout ce qui se passe dans le temple.  Il connaît cela aussi via Zacharie son père qui y a officié comme prêtre.

C’est pourquoi « La parole de Dieu fut adressée à Jean dans le désert.« . dit l’Evangile donc pas dans le temple.

Il ne faut pas être grand spécialiste en Ecriture Sainte pour deviner que Luc a une idée derrière la tête lorsqu’il prend tant de soin à noter les coordonnées historiques du début de la prédication de Jean Baptiste.  La quinzième année du règne de Tibère aurait amplement suffi.  Que viennent alors faire tous les autres ?  La réponse se trouve dans le dernier verset de l’évangile : « TOUT être vivant verra le salut de Dieu. » Autrement dit : désormais, le salut proposé par Dieu aura une dimension universelle.

Pendant que Luc écrivait ces mots, Rome régnait en maîtresse sur l’univers connu.  Partout les troupes romaines avaient établi la paix, une paix à la fois grandiose et fragile.  Luc savait à quel prix cette paix avait été payée.

Il y avait un immense besoin de salut, d’une réponse respectueuse aux questions que les gens se posaient.  Ni les répliques du pouvoir politique ni celles du pouvoir religieux ne satisfaisaient les gens de l’époque.  Une conversion est indispensable. « Conversion », une idée maîtresse dans la bouche du dernier prophète du 1° testament.

Luc écrit pour des païens convertis au christianisme.  Il est convaincu que Jean-Baptiste prend le relais des deux pouvoirs cités ci-dessus (pouvoir politique des Romains et pouvoir religieux des grands prêtres).  Jean-Baptiste relève un défi.  Ce que Rome et les gérants du Temple n’ont pu faire, lui, Jean-Baptiste le réalise.  Les sacrifices d’animaux dans le temple et les rites de purification ne sont pas ses priorités.  Il est à l’écoute et agit notamment auprès de ceux qui sont humiliés par les pouvoirs en place.

Mardi prochain, nous serons le 10 décembre : 76° anniversaire de la déclaration universelle des droits humains relayée aussi par Amnesty International.  Le texte de Luc nous invite à prendre au sérieux les souffrances de notre monde.  Jean-Baptiste et Jésus son cousin l’ont fait au premier siècle.  Il ne s’agit pas de copier ce qu’ils ont fait mais de l’adapter aux situations nouvelles qui se présentent à nous par exemple la situation des migrants comme le pape le fait à plusieurs occasions.  Certaines pauvretés structurelles de notre pays sont relayées par la campagne de « l’Action Vivre Ensemble ».  Cette association propose des pistes « pour redresser certains passages tortueux et aplanir des chemins rocailleux », pour que des personnes vivant à la marge de la société aient aussi droit à la dignité. 

Nous, hommes et femmes d’aujourd’hui, relevons la tête, « quittons nos robes de tristesse et revêtons la parure de la gloire de Dieu pour toujours »   comme l’écrit le prophète Baruch dans la première lecture. 

Ecrivons notre histoire en trempant notre plume dans l’encrier qui a servi à écrire cet évangile du 2° dimanche de l’Avent.

Abbé Stréber Fernand

« P’tite rawet » – Comment appelles-tu Dieu ? 

Une jeune fille d’origine musulmane s’était convertie et avait préparé son baptême pendant trois ans.

De passage dans la région, l’Evêque demande à rencontrer Fatima.  il demande à la jeune fille :

– Fatima, peux-tu me parler du mystère de la Sainte Trinité ?

Fatima reste muette, rougit, et répond qu’elle ne sait pas.

L’Evêque dit alors au prêtre :

– Comment voulez-vous que je la baptise si elle ne sait pas le ‘b.a.-ba’ de la foi chrétienne ?

Sans s’émouvoir, le prêtre qui avait préparé Fatima lui demande :

– Est-ce que je peux l’interroger, Monseigneur ?

– Allez-y.

– Dis-moi, Fatima, comment appelles-tu Dieu aujourd’hui ?

– Aujourd’hui, je l’appelle Allah.

– Pourquoi ?

– Parce qu’il est le Tout-Puissant, le Créateur. Il n’y a pas d’autre Dieu que Lui.

– Et demain, quand tu seras baptisée, est-ce que tu l’appelleras Allah ?

– Demain, je l’appellerai Abba.

– Pourquoi ?

 Et Fatima a cette belle expression qui ne pouvait venir que d’elle :

– Je l’appellerai Abba parce que demain je serai kif-kif avec Jésus, et Jésus l’appelait Abba.

Et le prêtre d’ajouter après avoir relaté cet épisode :

–  Dans les cours de récréation, on entend souvent des enfants dire : « Moi, mon papa, il a une grosse voiture ; Moi, mon papa, il est costaud… »

Et Jésus de dire : « Moi mon papa, il a créé l’univers ; Moi, mon papa, il pardonne ;

Moi, mon papa, il cherche la brebis perdue ; Moi, mon papa, il vous aime…’. »

 Extrait de Petites miettes spirituelles, Albert  ANDRE, Bua Habay

Citation

L’important ce n’est pas tant de baptiser les convertis que de convertir les baptisés.

Cardinal Tettamanzi, ancien Archevêque de Gênes et de Milan, 20° s.

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