Homélie – 22ème dimanche temps ordinaire Année B – Abbé Fernand Stréber

Première lecture (Dt 4, 1-2.6-8)

Moïse disait au peuple : « Maintenant, Israël, écoute les décrets et les ordonnances que je vous enseigne pour que vous les mettiez en pratique. Ainsi vous vivrez, vous entrerez, pour en prendre possession, dans le pays que vous donne le Seigneur, le Dieu de vos pères. Vous n’ajouterez rien à ce que je vous ordonne, et vous n’y enlèverez rien, mais vous garderez les commandements du Seigneur votre Dieu tels que je vous les prescris. Vous les garderez, vous les mettrez en pratique ; ils seront votre sagesse et votre intelligence aux yeux de tous les peuples. Quand ceux-ci entendront parler de tous ces décrets, ils s’écrieront : ‘Il n’y a pas un peuple sage et intelligent comme cette grande nation !’ Quelle est en effet la grande nation dont les dieux soient aussi proches que le Seigneur notre Dieu est proche de nous chaque fois que nous l’invoquons ? Et quelle est la grande nation dont les décrets et les ordonnances soient aussi justes que toute cette Loi que je vous donne aujourd’hui ? »

Deuxième lecture (Jc 1, 17-18.21b-22.27)

Mes frères bien-aimés, les présents les meilleurs, les dons parfaits, proviennent tous d’en haut, ils descendent d’auprès du Père des lumières, lui qui n’est pas, comme les astres, sujet au mouvement périodique ni aux éclipses. Il a voulu nous engendrer par sa parole de vérité, pour faire de nous comme les prémices de toutes ses créatures. Accueillez dans la douceur la Parole semée en vous ; c’est elle qui peut sauver vos âmes. Mettez la Parole en pratique, ne vous contentez pas de l’écouter : ce serait vous faire illusion. Devant Dieu notre Père, un comportement religieux pur et sans souillure, c’est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse,  et de se garder sans tache au milieu du monde.

Évangile (Mc 7, 1-8.14-15.21-23)

En ce temps-là, les pharisiens et quelques scribes, venus de Jérusalem, se réunissent auprès de Jésus, et voient quelques-uns de ses disciples prendre leur repas avec des mains impures, c’est-à-dire non lavées. – Les pharisiens en effet, comme tous les Juifs, se lavent toujours soigneusement les mains avant de manger, par attachement à la tradition des anciens ; et au retour du marché, ils ne mangent pas avant de s’être aspergés d’eau, et ils sont attachés encore par tradition à beaucoup d’autres pratiques : lavage de coupes, de carafes et de plats. Alors les pharisiens et les scribes demandèrent à Jésus : « Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ? Ils prennent leurs repas avec des mains impures. » Jésus leur répondit : « Isaïe a bien prophétisé à votre sujet, hypocrites, ainsi qu’il est écrit : Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. C’est en vain qu’ils me rendent un culte ; 
les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains.
Vous aussi, vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes. » Appelant de nouveau la foule, il lui disait : « Écoutez-moi tous, et comprenez bien. Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui rend l’homme impur. » Il disait encore à ses disciples, à l’écart de la foule : « C’est du dedans, du cœur de l’homme, que sortent les pensées perverses : inconduites, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, 
fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure. Tout ce mal vient du dedans,  et rend l’homme impur. »

Homélie – Une « pratique » religieuse peut en cacher une autre !
22°dimanche B:  Dt 4,1…8; Jc1,17…27; Mc 7,1…23.

Se laver les mains avant de passer à table est une règle d’hygiène élémentaire.  Chez nous cette règle n’est pas liée à un précepte religieux tel que l’a établi la tradition juive.  Je m’en réjouis.

Dans l’Evangile d’aujourd’hui des pharisiens entrent en scène.  Saint Marc écrit pour des communautés qui ne connaissent pas ces interlocuteurs.  Donc il précise que les pharisiens sont des juifs attachés à de multiples observances rituelles (il y en avait 613!).  Dans notre culture contemporaine, le mot « pharisien » est devenu synonyme d’hypocrite incarnant la perfection et cherchant à l’imposer aux autres.  Ces gardiens farouches de la loi religieuse ne lésinaient pas sur le détail.  Pour rester purs, ils ne se permettaient pas le moindre relâchement.

         Dans les évangiles, il y a une lutte à mort entre Jésus et les pharisiens.  Jamais le Christ ne se réconciliera avec eux.  A ses yeux, les pharisiens représentent une caste rigide culpabilisant ceux qui ne « pratiquent » pas comme eux.

         Dans le texte d’évangile que l’Eglise nous propose aujourd’hui, des pharisiens demandent à Jésus : « Pourquoi tes disciples prennent-ils leur repas avec des mains impures ? » Jésus répond avec force : « Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur ».

         Au temps où écrivait saint Marc, les premiers chrétiens se sont demandés s’ils devaient aussi respecter toutes les pratiques rituelles et cultuelles du Judaïsme.  On s’est alors souvenu des paroles de Jésus et des conditions qu’il avait énoncées.  Elles se résument à une seule: pratiquer avec le cœur.  Tout le reste est secondaire.

         Cela me fait penser à la phrase de Saint-Exupéry dans le dialogue entre le renard et le petit prince : « Voici mon secret, il est fort simple : On ne voit bien qu’avec le cœur.  L‘essentiel est invisible pour les yeux. »

         Je vous propose de considérer l’évangile d’aujourd’hui comme une question qui nous est posée.  Faisons-nous passer la pureté cultuelle avant le cœur ?  Pour Jésus en tout cas, la cause est entendue.  Rien n’est impur par nature.  Toute pureté vient du cœur et toute chose est bonne ou mauvaise selon l’usage que chacun en fait.  Le bien et le mal ne sont pas à l’extérieur de nous-mêmes.  Ils sont au-dedans de nous, dans notre cœur.

         Dans les deux premières lectures l’auteur biblique joint la « pratique » à l’écoute.  Cela est répété à deux reprises dans la première lecture, à propos des décrets et ordonnances de Moïse : « Écoutez-les pour que vous les mettiez en pratique ».  C’est dit en termes équivalents par saint Jacques dans la deuxième lecture, à propos de la parole de Dieu : « Mettez la parole en pratique, ne vous contentez pas de l’écouter ».

         Comment se fait-il alors que, dans le langage commun des catholiques et dans les statistiques, le mot « pratiquant » signifie uniquement : celui qui participe au culte ?  Combien de gens « pratiquent » dans ton village ?  m’a-t-on souvent demandé voici quelques décennies.

Chez saint Jacques, le mot « pratiquant » recouvre une autre manière de faire: « visiter les veuves et les orphelins et se garder sans tache au milieu du monde ».  Si je ne retiens que le sens habituel donné au mot « pratiquant », les pharisiens de l’évangile étaient des pratiquants plus que parfaits !  Interpellant quand on sait ce que Jésus pense d’eux.  Pharisien irréprochable ou publicain pardonné : il faut choisir.

         Il me paraît sage d’élargir le sens du mot « pratiquant » et de lui adjoindre un autre mot : l’écoute.   Le chrétien « écoute la parole « et « la met en pratique ».  Après avoir entendu les trois textes de ce jour il sera malaisé d’affirmer : « Je suis un bon chrétien parce que je dis mes prières à la messe, je fais brûler une bougie et je ne fais de mal à personne. »  Le chrétien écoutant et pratiquant la Parole ne reste pas indifférent aux souffrances et aux pauvretés du monde.  Il est prêt à renoncer à une partie de son confort pour atteindre cet objectif.  « Pratiquer » la religion, c’est tout cela.

         Le critère de la juste pratique religieuse, c’est le cœur, la qualité de notre présence aux plus petits, aux personnes qui tombent dans une situation de fragilité par exemple des personnes confrontées à un accident, une maladie, un décès et tout cela en étant nourri par l’écoute de la Parole de Dieu et le partage du pain eucharistique.

      Si à nos yeux, Dieu en vaut la peine, ne serait-il pas sage de « pratiquer » la religion du dimanche et aussi celle de la semaine ?

Abbé Stréber Fernand

P’tit rawett’ – ON NE TROUVE QUE CE QUE L’ON ATTEND

Il était une fois un homme assis près d’une oasis, à l’entrée d’une ville du Moyen-Orient

Un jeune homme s’approche et lui demande:

– Je ne suis jamais venu ici. Comment sont les gens qui vivent dans cette ville ?

Le vieil homme lui répondit par une question:

– Comment étaient les gens dans la ville d’où tu viens?

– Egoïstes et méchants.  C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je suis bien content de partir.

– Tu trouveras les mêmes ici, lui répondit le vieil homme.

 

Un peu plus tard, un autre jeune homme s’approche et lui pose la même question:

– Je viens d’arriver dans la région.  Comment sont les gens qui vivent dans cette ville?

Le vieil homme répondit de même:

– Dis-moi, mon garçon, comment sont les gens dans la ville d’où tu viens?

– Ils sons bons, bienveillants, accueillants, honnêtes. J’y avais de nombreux amis et j’ai eu beaucoup de mal à la quitter.

– Tu trouveras les mêmes ici, répondit le vieil homme.

 

Un marchand qui faisait boire ses chameaux, avait entendu les deux conversations. Dès que le second jeune homme s’éloigna, il s’adressa au vieillard sur un ton de reproche:

– Comment, peux-tu donner deux réponses complètement différentes à la même question posée par deux personnes?

– Mon fils, dit le vieil homme, chacun porte son univers dans son cœur. D’où qu’il vienne, celui qui n’a rien trouvé de bon par le passé ne trouvera rien ici non plus. Par contre celui qui avait des amis dans l’autre ville trouvera ici aussi des amis loyaux et fidèles. Car vois-tu, les gens sont vis-à-vis de nous ce que nous sommes vis-à-vis d’ eux.

Extrait de «Il était une foi » tome 1 disponible chez Fd Stréber

Laissez-nous votre commentaire !