« L’abbaye de Cordemois ne ferme pas et les soeurs peuvent y poursuivre leur vie monastique en paix »

Les religieuses de l’abbaye de Cordemois, à Bouillon sont autorisées à poursuivre leur vie monastique. L’abbaye ne fermera pas et pourra même sans doute se développer.

Le monastère de Cordemois ne ferme pas et les sœurs peuvent rester!

Deux religieuses de l’abbaye de Cordemois décédées récemment n’auront pas pu se réjouir avec les sœurs de l’important accord intervenu voici quelques jours. Le calvaire est terminé. Le monastère qui change de nom et quitte le giron cistercien en attendant un nouveau statut qui sera déterminé par le successeur de Mgr Pierre Warin, l’évêque du diocèse de Namur. Les religieuses peuvent poursuivre leur vie de nonnes sans craindre d’être relevées de leurs vœux (la réduction à l’état laïc). Elles pourront même développer leurs activités. Une nouvelle ASBL vient d’être créée, comme l’explique M Paul Muylaert, l’avocat bruxellois des religieuses.

« L’ensemble des moniales ayant appartenu à l’abbaye Notre-Dame de Clairefontaine, fermée par décision du Dicastère compétent du 15 décembre 2016, ont pu trouver un terrain d’entente et conclure un accord transactionnel, explique-t-il. Cet accord règle à l’amiable les difficultés engendrées par cette décision de fermeture, que la majorité des religieuses a acceptée en rejoignant d’autres communautés et que d’autres ont toujours contestée en souhaitant poursuivre une vie religieuse à Cordemois », précise encore le conseil des sœurs.

Un accord en trois points

Quelle est la nature de cet accord ?

Selon l’avocat ; il s’articule en trois points. Tout d’abord, que l’ASBL abbaye Notre-Dame de Clairefontaine, dont toutes les sœurs sont membres, change de nom. Place maintenant à l’ASBL abbaye de Cordemois. « Elle aura pour but l’exercice de la vie religieuse en commun mais sans plus aucune référence aux constitutions de l’Ordre des Cisterciens de la Stricte Observance », précise Me Muylaert. Il n’est plus permis d’utiliser la dénomination abbaye Notre-Dame de Clairefontaine, sous quelque forme que ce soit, celle-ci étant définitivement fermée », ajoute-t-il.

Ensuite, une partie des avoirs financiers de l’ASBL sera attribuée aux monastères ayant reçu les sœurs qui ont quitté Cordemois lors des sept dernières années, pour subvenir notamment à leurs besoins et frais. Enfin, dit encore Me Muylaert, « les autres avoirs de l’ASBL lui demeureront acquis, à l’exception de documents et effets personnels que certaines sœurs pourront récupérer ».

En d’autres termes, cet accord permet donc de mettre concrètement en œuvre la décision de fermeture de l’abbaye, tout en permettant aux sœurs souhaitant demeurer à Cordemois d’y poursuivre une vie religieuse en dehors de l’Ordre cistercien.

Cet accord historique peut être perçu comme un nouveau départ pour ces religieuses.

Rien n’allait plus depuis 2016

La décision de fermeture de l’abbaye n’a pas été prise par l’Ordre des cisterciens mais bien par le Saint-Siège le 15 décembre 2016. La communauté a été dissoute et les sœurs appelées à quitter le lieu et de trouver une autre communauté de l’Ordre. Un document stipulait une fermeture à brève échéance. Une non-obéissance peut aller jusqu’à l’exclusion de l’Ordre auquel appartenaient les sœurs. Sept religieuses ont toutefois décidé de rester, parce qu’elles disaient n’avoir rien à se reprocher. Tout cela avait créé l’émoi dans toute la région et la mobilisation s’était organisée pour soutenir les religieuses et empêcher qu’on ne ferme le monastère qui joue un rôle important dans la communauté bouillonnaise et au-delà. En mars 2023, dans une interview exclusive, frère Éric, d’Orval, un des membres de la Commission de fermeture de Cordemoy nous avait déclaré: « C’est clair, il n’y a plus de communauté cistercienne à Cordemois ».

La visite capitale au Vatican du 10 février 2023

Le 10 février 2023, l’avocat Paul Muylaert avait été reçu au Vatican pour y plaider la cause des sœurs de Cordemois. Il avait même fait traduire le dossier en espagnol pour le pape François. La délégation belge avait été reçue par le préfet des religieux, c’est-à-dire le numéro 1 des religieux au Vatican, le cardinal Braz de Aviz, lors d’une audience. Le dossier des moniales très épais était intitulé « Les justes motifs pour la poursuite d’une vie monastique ». Le but était de convaincre les plus hautes autorités religieuses de permettre aux sœurs poursuivre leur vie religieuse à Bouillon.

Ce dossier, très complet comptait des éléments du droit canon. On pouvait y lire que les sœurs subissent une pression maximale dans la mesure où l’autorité monastique a entamé une procédure dite de Monition canonique afin d’obtenir le renvoi des religieuses et ce, sur base du Canon 696 qui prévoit un renvoi en cas de désobéissance obstinée aux prescriptions légitimes des supérieurs en matière grave. Cela, « alors que le droit canon prévoit expressément que les preuves doivent être produites ; or, les moniales n’ont reçu, à ce jour, aucune preuve en rapport avec la prétendue désobéissance obstinée, ni par ailleurs les motifs pour la fermeture. Je rappelle que cette démarche est une résistance légitime à une grave injustice. », avait souligné leur avocat.

« Désobéissance obstinée et réduction à l’état de laïc »

En mars 2023, l’ordre cistercien s’est étonné de la visite de l’avocat des sœurs à Rome. Il avait alors envoyé un huissier pour signifier aux religieuses leur renvoi pur et simple de l’ordre cistercien, selon la décision de l’abbé général. Voici ce qu’on pouvait lire dans ce communiqué: « L’abbé général en son conseil, après avoir étudié le dossier dans ses différents aspects, dont l’aspect humain et fraternel, s’est trouvé dans l’obligation de décider leur renvoi de l’ordre. Le droit de l’Église (C. 686) prévoit la possibilité de renvoi d’une religieuse pour des causes graves, comme »la désobéissance obstinée aux prescriptions légitime des supérieurs en matière grave ». Ceci ayant été établi, la procédure de renvoi, connue des six religieuses, qui implique la réduction à l’état laïc, a donc été initiée par les supérieures actuelles dont dépendent aujourd’hui les religieuses. Les deux avertissements successifs (monitions) prévus par la législation de l’Église ont été envoyés aux sœurs leur demandant de rejoindre leur communauté d’élection. »

Philippe Carrozza, journaliste

Publié le 12 juillet 2024

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Si vous souhaitez visiter virtuellement l’abbaye, voici un reportage de TV Lux ici !

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